Ce que dit la Bible ou plutôt ce qu’elle ne dit pas

Pour justifier des propos sur l’homosexualité, on a souvent recours à la Bible. C’est légitime puisque la Bible n’est pas seulement un livre (ou plutôt une bibliothèque du grec « biblios ») où l’on parle de Dieu, mais qu’elle se donne elle-même comme un livre où Dieu parle à l’homme « Il ne s’agit pas d’une parole sans importance pour vous : c’est votre vie » (Deutéronome 32,47). D’une autre manière, l’évangéliste Saint Jean exprime très clairement son intention à plusieurs reprises (1, 12-18 ; 2,11 ; 11, 42 ; 17,20-21), particulièrement à la fin de son récit : « Ces signes ont été consignés dans ce livre pour que croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour que, en croyant, vous ayez la vie en son nom » (Jean 20, 30-31). Elle est donc Source vive pour notre foi chrétienne.

Pourtant, la Bible n’est pas un manuel directement utilisable pour trouver réponse aux questions existentielles contemporaines. On oublie parfois que plus de 2000 ans nous séparent de la mise par écrit de ses textes.

Ni l’Ancien Testament, ni le Nouveau ne connaissent des expressions que l’on pourrait directement traduire par « homosexualité » ou par « homosexuels » car l’emploi de ces mots relève d’une interprétation. La Bible, conformément à toutes les cultures du Proche-Orient environnantes, ne connaît pas de concept abstrait décrivant une orientation sexuelle. Pour ces civilisations, la sexualité est inséparable des autres rôles et fonctions de l’individu dans la société. De plus, le peuple d’Israël était confronté à un univers dans lequel les nombreuses divinités étaient représentées avec des attributs sexuels, liant étroitement religion et sexualité. Reconnaissant le Dieu unique qui l’a libéré de l’esclavage des Égyptiens, il devra tout au long de son histoire, « désacraliser » la sexualité, pour affirmer sa singularité et sa sainteté. Avoir des comportements sexuels, tels que les peuples environnants les vivaient, sera donc considéré comme idolâtrique, c’est-à-dire méconnaissance du Dieu unique.

Il est donc bien difficile d’aborder la question des rapports entre la Bible et l’homosexualité telle qu’elle peut se vivre aujourd’hui, sans tomber dans le plaidoyer pro homo, ou, à l’inverse, sans extraire quelques versets bibliques retirés de leur contexte pour condamner l’homosexualité.

D’une manière générale, elle est indifférente à l’homosexualité elle-même. Dans les nombreux livres que constituent la Bible, seuls 5 passages utilisés pourraient exprimer une opinion négative sur des relations sexuelles homogénitales : un texte dans la lettre de saint Paul aux Romains, et 4 versets dont deux tirés du Lévitique, les deux autres se trouvant dans la lettre de saint Paul aux Corinthiens et dans la lettre à Tite.

Un autre récit a été parfois utilisé pour condamner l’homosexualité : c’est le fameux récit de Sodome au chapitre 19 du livre de la Genèse, à tel point que le mot « sodomite » est encore repris pour parler d’hommes homosexuels.

Vous trouverez dans ce site quelques éclairages apportés par Xavier Thévenot et Daniel Helminiak dans leurs ouvrages respectifs (Xavier Thévenot, Homosexualités masculines et morale chrétienne, Paris, le Cerf, 1985 – Daniel Helminiak, Ce que la Bible dit vraiment de l’homosexualité, Paris, Les empêcheurs de penser en rond, 2005)

Si leurs interprétations diffèrent sur certains points, leur conclusion est identique : on ne peut demander à la Bible de répondre à la question de l’homosexualité telle qu’elle se pose aujourd’hui, et, en aucun cas, s’appuyer sur ces quelques extraits pour condamner l’homosexualité.

Claude Besson

Extraits du chapitre 6 (Introduction)
 dans "Homosexuels catholiques, sortir de l'impasse",
 Claude Besson, Paris, Editions de l'Atelier, 2012.
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