Nous reproduisons ici un commentaire d’une fiche pratique (charte d’inclusivité) préparée par Cécile Guinand, membre d’une Église en Suisse et Denis Gaultier, membre d’une Église en France (Version au 9 juin 2016)
Cette fiche pratique, même si elle contient des affirmations que nous avons souhaitées pédagogiques, a été voulue avant tout comme source de questionnements dans nos Églises pour que chacune et chacun puisse s’y approprier l’accueil inconditionnel de toutes et de tous. Elle s’achève par une prière, car c’est bien en relation avec l’amour de Dieu que nous sommes appelés à vivre cet accueil.
On peut dire qu’une Église inclusive est une Église qui refuse toute exclusion, qu’elle soit de type racial, social, sexuel, d’apparence, d’appartenance, etc. Autrement dit, il s’agit d’une Église qui n’a de cesse de prêcher l’accueil inconditionnel de toute personne et de vouloir en vivre.
Pourtant, la réalité se traduit souvent par des attitudes d’exclusion, conscientes ou inconscientes. La sexualité peut être en première ligne et c’est pourquoi le débat sur l’inclusivité peut se cristalliser autour des orientations sexuelles. Mais si l’inclusivité concerne bien cette question, elle va bien au-delà.
Sommes-nous inclusifs ? Entre nos déclarations pour l’accueil inconditionnel et la réalité de notre communauté, existe-t-il un ou des décalages ? si oui, comment y remédier ?
Un tel accueil a pour modèle l’attitude de Jésus-Christ autant que la mission de l’Église d’unir les êtres humains dans une même dynamique d’amour qui nous donne de vivre en communion.
Par conséquent, celles et ceux qui vivent en relation avec le Christ ou qui veulent le découvrir ne peuvent ni ne doivent faire l’objet d’aucun rejet au sein de notre Église. Un homme au chômage qui, le vivant mal, se montre généralement grincheux peut être aussi un brillant intellectuel, un soutien précieux pour ses proches et une personne toujours prête à donner un coup de main lorsqu’on sait le lui demander. De même que le père de famille entrepreneur et créateur d’emplois fort bien adaptés à des personnes en situation de handicap peut également être un époux avare et sexiste… L’accueil inclusif doit prendre en compte que personne n’est parfait, ni défini par une seule caractéristique.
C’est ce qui s’appelle « l’intersectionnalité » qui consiste à voir dans un tout davantage que la somme des éléments pris séparément. Une identité n’est ainsi jamais composée d’une seule caractéristique, mais de plusieurs éléments permanents ou changeants qui se croisent et tissent une réalité unique.
Comment montrer que notre Église entend reconnaître en chacune et chacun son identité première en Christ ?Comment notre Église peut-elle s’assurer que tout message qu’elle adresse à ses membres porte principalement sur notre identité première de fils et filles du Père en Christ, avant d’être étendue à nos « réalités secondes » de mariés, de célibataires, de travailleurs, de citoyens, de malades, de bien portants, etc. ?
Si chaque personne est unique, identifier les caractéristiques d’une exclusion permet de mieux comprendre les difficultés rencontrées par certaines personnes. De même, mettre l’accent sur les nombreuses caractéristiques positives qui constituent une identité individuelle aidera à la reconnaissance de ces mêmes personnes.
Quelles sont les personnes que nous reléguons en marge ? de quelle façon pouvons-nous leur déclarer et leur montrer notre envie d’ouverture et d’accueil ? Quelles minorités ou catégories de la population régulièrement exclues ou mises à l’écart souhaite-t-on nommer dans nos messages d’accueil ? Comment travaillera-t-on ensuite à mettre en pratique l’accueil desdites personnes ?
Beaucoup ne prennent conscience de la réalité d’une exclusion qu’une fois l’avoir “rencontré”.
Par exemple, des personnes n’ont pris conscience de la pauvreté qu’en visitant un pays du tiers-monde ; de l’exclusion sociale que représente le fait ne pas pouvoir se dire homosexuel/le qu’après avoir rencontré des personnes homosexuelles célibataires ou en couple ; de l’injustice que représente le fait de ne pas trouver un travail en découvrant les talents de personnes exclues du monde du travail…
L’Église pourrait-elle envisager des moments de rencontre et de partage avec des personnes rejetées, à l’écoute de leur témoignage, sans rien renier de nos questionnement théologiques ou éthiques, mais dans le désir de cheminer ensemble en Christ qui seul est « le Chemin, la Vérité et la Vie » ?
Dépassant la théorie, il s’agit de se donner les moyens pratiques d’un accueil qui tende à l’inconditionnel, en partant de la réalité concrète du lieu et du contexte social que l’on souhaite ouvrir foncièrement à l’inclusivité. Certains constats très simples nous donnent un aperçu des problèmes que l’on peut rencontrer : par exemple, certaines personnes que l’on accueille peuvent elles-mêmes ne pas être accueillantes… On peut alors souligner l’importance d’une charte qui permet d’afficher l’attitude d’accueil qu’une Église attend de ses membres et bénévoles. C’est une façon de s’engager à mettre en pratique des positions clairement affirmées et de se donner les mots pour les exprimer. C’est également une manière de donner son identité à une paroisse et de l’affirmer face au monde dans un souci de cohérence.
Si notre Église se met en chemin pour affirmer son inclusivité, quelles activités, rencontres, moments de partages et de discussions pourrait-elle mettre en place pour que chacune et chacun des paroissiens puissent vivre cette orientation dans la confiance et l’envie d’y prendre part ?
Nous vous proposons la prière de Joe Forsyth, prêtre canadien de l’Église anglicane d’Edmonton :
Dieu d’amour, toi qui as créé le monde à partir du chaos, rassemble-nous dans l’unité de ton amour inconditionnel.
Malgré les couleurs différentes que tu donnes à nos vies, permets-nous d’être attentifs à ta présence manifestée à travers les autres, garde-les présents dans nos cœurs et nos esprits.
Donne-nous la capacité de les écouter, donne-nous l’ouverture pour les entendre, donne-nous le désir de les comprendre.
Alors nous ressentirons ce que les autres peuvent éprouver et ainsi, ensemble, nous pourrons te trouver.
Nous te rendons gloire, Seigneur, pour tous ceux qui, dans toutes les Églises chrétiennes du monde, sont témoins de ton amour et qui tentent de le transmettre au monde à travers leur vie. AMEN .
Version au 9 juin 2016 préparée par :Cécile Guinand, membre d’une Église en Suisse et Denis Gaultier, membre d’une Église en France